Valentin le Désossé, de son vrai nom Jules Étienne Edme Renaudin (Paris, 26 février 1843 – Sceaux, 4 mars 1907), fut un danseur et contorsionniste français célèbre.
“Valentin fit ses débuts, en 1860, au Moulin de la Galette, fit les délices des Folies-Robert, de l’Ermitage, de l’Élysée Montmartre et du Château-Rouge; qui brilla au Château-des-Fleurs à coté d’Alice la Provençale, et enfonça Brididi ; Valentin qui pendant sa longue carrière, ayant déjà exécuté lus de 90 000 danses, continua sans défaillance, à soulever l’admiration haletante des foules par la sureté de son bras, la prodigieuse agilité de son pied et la variété d’attitudes dont il sait orner une valse au point de la transformer en véritable symphonie des langueurs amoureuses ;
“Valentin le roi des Danseurs“
Mes Mémoires – Jane AVRIL Coll. PHEBUS
Laissons Jeanne AVRIL décrire Valentin le Désossé:
“Valentin de son vrai nom Jules RENAUDIN est aujourd’hui la personnalité la plus intéressante des bals publics. Un homme grand, maigre, flottant dans sa redingote noire; une face glabre marquée par la longueur de son nez, obscurcie par la minceur des yeux; masque triste. La date de ses débuts lui impose un âge respectable, sans lui enleverde sa vigueur physique, ni de son prestige auprès des femmes. Les hommes le vénèrent, et les filles l’adorent. il est comme le grand maître des chevaliers servis de la place Blanche. Mais ce qui rend sa vie particulièrement digne d’admiration, c’est que, pour jouir largement de l’existence, Valentin n’a pas besoin des bienfaits dont il est accablé par le sexe faible de Montmartre et autres lieux. il est riche, et son frère exerce honorablement, non loin de Paris, les pudibondes fonctions de notaire. Si donc Valentin se comptait dans la position sociale qu’il doit à ses talents autant qu’à ses qualités morales, c’est uniquement par amour de l’art, par dilettantisme, disons mieux, pour affirmer la supériorité du mâle sur le miché.
Le surnom de Valentin remonte à ses premiers pas. En ce temps-là courrait dans les bastringues une chanson dont le refrain disait: “Ah! Valentin, verse, verse!/ Ah Valentin / Verse sans fin !” La facilité avec laquelle le jeune danseur dégustait les saladiers de vin sucré offerts conformément à l’usage lui valu dès lors l’attribution de ce vocable fameux.
Quant à l’épithète Désossé, elle est de date beaucoup plus récente. C’est Mermeix qui le premier, la lui appliqua, le lendemain de sa rentrée au Jardin de Paris en 1885.Le titre était bien trouvé; il resta consacré par le public “.
Fils d’un notaire de Sceaux, il fut d’abord négociant en vins, puis se produisit au Tivoli-Vauxhall de Paris avant de devenir maître de ballet au Valentino, au Bal Mabille puis à l’Élysée-Montmartre (où il rencontre Louise Weber dite “La Goulue”. Il passa au Bal de la Reine blanche, puis au Moulin Rouge où il fut le danseur et contorsionniste du bal du Moulin Rouge partenaire de la Goulue de 1890 à 1895.


Toulouse-Lautrec l’immortalisa au côté de la Goulue. Sa vie inspira une pièce de Claude-André Puget, Valentin le désossé, créée en 1932 au Théâtre Michel à Paris, avec pour interprète de son personnage Pierre Fresnay.
La pièce fut diffusée en téléfilm en 1964.
Valentin le Désossé apparaît également dans les films Moulin Rouge (1952), French Cancan (Philippe Clay, sous le nom de Casimir le Serpentin, 1954) et Lautrec (1998).
C’est une affection du syndrome d’Ehlers-Danlos qui lui valut son surnom de « désossé ».
Le dimanche 6 octobre 188, le Moulin Rouge créé par Joseph Oller et Charles Zidler ouvre ses portes. Il ne s’agissait pas d’un lieu de plaisirs comme tant d’autres à Montmartre.
Négociant en vins dans la rue Coquillère, issu d’une famille de notables de Sceaux (son père est notaire), c’est à la nuit qu’appartient ce danseur passionné. Ce véritable contorsionniste se produisait pour son plaisir au Tivoli Vauxhall, puis il devint maître de ballet au Valentino, chez Mabille, à l’Elysée-Montmartre et présenta des spectacles aux côtés de la Goulue au Moulin-Rouge, où il remporta d’immenses succès. C’était également un cavalier enthousiaste.
Toutes les femmes auraient voulu danser avec Valentin.
L’emplacement a été choisi avec attention :
Alentours de la Butte Montmartre, quartier à la mode où l’on se rend pour prendre un bol d’air pur, boire un verre au Moulin de la Galette, où l’on côtoie les mauvais garçons et les filles venues des quartiers malfamés.
Un public, bourgeois, financièrement aisé à la recherche d’émotions fortes et de plaisirs passera devant et par le Moulin Rouge..
Le triomphe est immédiat : le tout Paris, la haute société, les artistes, peintres et écrivains, de renoms ou pas, viennent découvrir le quadrille naturaliste ou réaliste, appelé plus tard french cancan et s’encanailler.
Les plus illustres danseuses de cette époque montent sur la scène du Moulin Rouge. D’abord la Goulue et sa gouaille dont la réputation n’est plus à faire, Jane Avril, la Môme Fromage, Grille d’égout, Nini Pattes en l’Air, Rayon d’Or, Mélinite ou encore Yvette Guilbert.
Le danseur se nomme Valentin le Désossé, appelé l’Homme du Quadrille. Il est grand, “miteux et râpé” disait-on et très maigre, habillé et impassible dans sa redingote noire, boutonné jusqu’au cou, le pantalon étroit attaché à ses vieilles bottines par un “sous-pied”, toujours coiffé d’un haut de forme penché en avant, n’avait pas son pareil pour initier et faire danser les filles. Valentin le Désossé et la Goulue étaient partenaires depuis 1886.

Il dansait, sautait et exécutait le grand écart sans accepter la moindre somme d’argent : « C’était pour mon plaisir ! » Disait-il.
L’endroit représente un moulin peint en rouge, aux ailes animées, avec une meunière regardant par une ouverture et un meunier penchant la tête par une autre fenêtre. Mais la grande époque du cancan prend fin en 1892 .
Cet homme est un mystère, dira t’on. Jules Renaudin d’après l’état civil, avait tenu un débit de vins rue Coquillère puis, exproprié, il s’occupait des encaissements de son frère, notaire à Sceaux, mais nous y reviendrons.
Il mène dans la journée une existence d’un homme tout à fait convenable. Quand tombe le soir, il traverse Paris et se rend au Moulin Rouge.
Son physique prête certes à rire mais les filles du quadrille le portent en triomphe tous les soirs. Frisant la quarantaine, il est connu de tous les bals publics de Paris, comme le roi de la valse. Par goût, depuis 1860, il a dansé dans tous les bals parisiens, des plus populaires aux plus chics, du Trivoli Vauxhall, du Moulin de la Galette au Château des Fleurs, de Valentino à Mabille qui fermera ses portes en 1877, des Jardins de Paris à la Reine Blanche.
” Parmi les habitués de Mabille, j’ai remarqué un curieux personnage, long, long, long en jambes, en bras, et en cou, en doigts.
Il a des allures de flamant rose dégingandé. Maigre comme un clou, un chapeau haut de forme canaille, penché sur le côté, un habit bleu ciel et prune et sa chemise blanche impeccablement empesée. Il appartient clairement à un autre monde que celui des chicards, ces gros négociants en cuir et en fourrures vêtues de bric et de broc, dans des tons multicolores.
C’est un maître de ballet, encore un employé des sieurs Mabille. Il a pour charge de jouer le galant cavalier de ces dames venues distraire leur solitude et leur ennui aux accords de l’orchestre de Métra… Lorsque le Maître de ballet leur tend la main les en étouffer“.
Ça c’est Cancan – Editions SOLAR par Fabienne TSAI – Octobre 2004.
On s’interroge sur cet homme qui frise la cinquantaine : il ressemble à un acrobate mal nourri, toujours vêtu d’une redingote noire, d’un pantalon jaune et coiffé d’un haut de forme cabossé et luisant.
A la fin du second Empire, au Casino Cadet et il n’est pas peu fier d’avoir été surnommé le Désossé par Mermeix dans le journal « La France ». En 1889, il possédait au 11, avenue de la Motte-Piquet, un immeuble dont il louait plusieurs appartements.
Il s’était fait graver deux cartes de visite différentes. Sur la première, on lisait : « Valentin le Désossé, ex-premier danseur des bals de Mabille », et sur la seconde : « M. Renaudin, propriétaire, avenue de la Motte-piquet.
Valentin le Désossé à fait lui même le compte de ses ” exhibitions artistiques”: 39 926 valses, 27 220 quadrilles, 14 966 polkas et mazurkas, 1000 lanciers, soit, 83 112 danses.
Valentin Le Désossé remerciera toujours les journalistes en adressant le petit mot suivant:
«J’ai l’habitude, quand un journaliste me fait l’honneur de publier quelques lignes en ma faveur, de lui envoyer mes remerciements les plus sincères. Agréez, monsieur, mes civilités respectueuses.”
Son menton en galoche, son nez de polichinelle, sa bouche mince ont été immortalisés par Lautrec. ” Aux côtés de la Goulue on remarque son partenaire masculin, Valentin le Désossé. Son haut de forme verdâtre, son frac élimé et luisant, son triste mégot au coin des lèvres sont transfigurés sitôt qu’il se lève pour danser. Sa longue silhouette maigre et élastique est bien au service de l’amour de la danse.
Ça c’est Cancan – Edtions SOLAR par Fabinne TSAI – Octobre 2004.
Valentin le Désossé, opposera le détachement, le flegme et la froideur à la sensibilité de la danseuse. Henri de Toulouse-Lautrec saisira la funèbre attitude de Valentin le Désossé devenu le faire-valoir de la Goulue, sur l’affiche du Moulin Rouge.
« La prodigieuse agilité de son pied et la variété d’attitudes dont il savait orner une valse au point de la transformer en véritable symphonie des langueurs amoureuses » Rodrigues 1882.
Mais sans doute à cette époque, aime t’il, avant tout soigner les fleurs de La Goulue qui s’éteindra le 21 janvier 1929 dans la misère !
Quand Valentin le Désossé danse au Moulin Rouge avec la Goulue, il fait l’admiration de Jules Lemaitre dans l’Écho de Paris :
« Ce sont deux grands artistes. Elle tourne, que dis-je ?
Elle tourbillonne autour de lui avec une rapidité si vertigineuse – et si aisée ; il la soutient, il la guide dans un caprice de pas sans cesse rompus et entrecroisés, avec une si impeccable sûreté ; l’harmonie de leurs mouvements est si parfaite que, si vous espérez jamais voir une grâce plus précise unie à une force plus souple…, inutile de chercher, vous ne trouverez pas… »
Avec sa silhouette longiligne et son extraordinaire souplesse, Valentin-Le-Désossé était l’un des piliers des nuits parisienne.
Leur “Valse 1900“ et leur “Polka endiablée“ firent accourir le “Tout Paris“.
Le 28 décembre 1902, pour la fermeture du Moulin Rouge, une petite fête est donnée sur invitation, ce sera la dernière. Ce soir là, le quadrille disparu véritablement. Quelques survivantes étaient venues dire adieu au théâtre : Jane Avril, Grille d’égout, la Môme fromage, et Valentin le Désossé.
Valentin le Désossé promenait avec tristesse sa longue silhouette, mâchonnant son éternel cigare d’un sou :
« Aujourd’hui, ce n’est pas un jour ordinaire. Je tiens à remercier tous les contrôleurs, tout le personnel, patrons et employés, et surtout toutes ces femmes qui ont couru après moi pendant de si longues années » Valentin le Désossé.
Voir aussi le site du Moulin Rouge Valentin le Désossé ” Le Cancaneur du Moulin Rouge”
Puis il disparaît. Plus personne n’a de ses nouvelles et les rumeurs vont bon train : On dit qu’il a ouvert un bistrot, on assurent qu’il a travaillé comme ouvrier dans une fabrique d’ascenseurs. d’autres racontent qu’une courtisane chic lui avait offert un jour un fer à cheval en diamant… Bref, nul ne sut jamais ce qu’il devint mais il passa à la Ferté Alais … (1843-4 mars 1907).
La grande guerre fera oublier cette époque, et ce n’est qu’au cours des années 1930 que l’on commencera à se souvenir de la « Belle Époque ». Alice Cocéa, fait son retour sur scène en interprétant la pièce « Valentin le Désossé », au théâtre Michel, lui, Valentin, qui avait connu à Mabille, quand même, la belle Céleste Mogador et la Reine Pomaré qui endiablaient Paris au point que la troupe devait se résoudre à intervenir…
Dans la famille Renaudin, Il y a d’abord le père, Hugues Edme RENAUDIN, né en 18O6 à Sauvigny-le-Bois, près d’Avallon.
Il monte à Paris et s’installe comme marchand de vin à la Chaussée d’Antin. C’est là que naît le 3 février 1848, son fils, Hugues Auguste RENAUDIN de son mariage avec Marguerite CHAUSSE, de 15 ans sa cadette, née le 22 février 1822 à la Ferté Alais.
Marguerite CHAUSSE a toujours gardé pour le village de la Ferté Alais une grande tendresse si bien que son fils, Notaire fortuné, selon les volontés de sa mère procédera à un leg le 4 novembre 1900 qui sera reçu par la ville lors de la séance du Conseil Municipal du 6 avril 1914:
Marguerite devra élever seule ses deux fils, Edmé Jules RENAUDIN, dit « Valentin le Désossé » né en 1843, le second, Hugues âgé de 9 ans, lorsque son mari est frappé et décède d’une crise d’épilepsie au cours de l’année 1852.
Marguerite RENAUDIN, née CHAUSSE élèvera ses deux fils dans le respect des valeurs. C’est Maître RENAUDIN lui-même qui reconnaît que les deux frères ont été élevés « dans les principes de cœur, de bonté et de sentiments… »
Hugues, le second fils, abandonnera le négoce de vins, fera son droit, et entré dans l’étude d’un notaire de Paris, il devient le premier clerc, puis Notaire. Marguerite RENAUDIN a vendu le commerce de vins et demeure avec Jules sur la rive gauche à la Motte Piquet, où elle résidera jusqu’à sa mort.
Jules RENAUDIN dit Valentin le Désossé décède en célibataire le 4 mars 1907 à Sceaux au domicile de son frère, Notaire et Officier de la Légion d’Honneur qui demeure alors 5, rue des Écoles.
Valentin le Désossé a toujours porté le deuil de sa “Rosalie”, sa fiancée.
La famille Renaudin sera grandement généreuse tant à Sceaux qu’à Clamart, où de nombreuses rues portent le nom de Marguerite Renaudin. Par ailleurs, Me Renaudin, propriétaire d’un terrain, fait bâtir en 1895 à Sceaux, par l’architecte Jacques Lequeux, l’hospice sainte-Marguerite en souvenir de Marguerite Renaudin.
Le Roi des valseurs SOUVENIRS D’ANTAN.
“Les journaux sans plus de commentaires, publiaient, à la fin d’avril de 1907, la note nécrologique suivante : « Valentin-le-Désossé, ce danseur fameux d’une autre époque, dont la gloire spéciale eut de l’écho jusqu’aux confins des mondes civilisés, vient de mourir à Sceaux.”
« Il fut une physionomie curieuse moins pour son agilité remarquable qu’en raison de la double personnalité qu’il incarnait.
« Valentin-le-Désossé, s’appelait, en effet, Jules Renaudin, et il était le fils de fort honorables et sérieux commerçants qui exploitèrent longtemps à Paris un commerce de vins.
«Il fut une physionomie sympathique acrobate émérite, ingénieux caricaturiste pour ainsi dire de la danse, créateur d’une chorégraphie spéciale, cet habitué nocturne des lieux de plaisir devenait au jour, un commerçant laborieux,consciencieux, prévoyant.
« Au dire de ceux qui l’ont connu, «il s’amusa» honnêtement, joyeusement; il ne fut jamais un professionnel.
« Étoile, autrefois, des “la Goulue, des Vif-Argent, des Grille-d’égout, des Nini-Patte-en-l’Air”, Jules Renaudin est mort en brave homme comme il avait vécu, connu sous le tendre nom de « Grand-Père » que gentiment lui donnaient les bambins de Sceaux. » Trainant, cette curieuse figure, ce grand cadavre ambulant que l’on affirmait originaire de la savoie, au bal Mabille au lendemain de la guerre, Il méritait mieux que ces courtes notes, car il fut pendant plusieurs années l’un des meubles vivants les plus curieux des bals publics de Paris.
Grand, maigre, osseux, rasé, blafard et blême, la tête en forme de rasoir et anguleuse comme un Rochefort maigre, si J’ose dire, il était en effet fort souple et était l’un des exécutants, sinon des inventeurs, les plus épatants de cette fameuse valse tourbillonnante, qui, faisait l’admiration des étrangers et des étudiants fraîchement débarqués de leur province.
Au bout de deux minutes, les jambes écartées, il arrivait que sa danseuse valsait entre ses jambes et comme de l’autre côté, à tel point que l’on se pouvait se demander comment ils pouvaient bien faire pour arriver à tourner et à se tenir en équilibre. Cependant, après un dernier tourbillon, il remettait sa danseuse en place de ses larges mains osseuses et s’arrêtait comme si de rien n’était aux applaudissements de la foule.
C’est surtout dans la fameuse nuit du Grand Prix de Paris à Mabille, sur le rond de parquet légendaire, sous les palmiers de zinc, que Valentin-le-Désossé remportait son plus grand succès avec ses partenaires favorites. Tandis qu’il valsait, les Anglais, dans les boxes du fond se collaient des cuites consciencieuses de champagne, soit pour noyer le chagrin de la défaite, soit pour célébrer leur victoire, et cette nuit-là, les voitures circulaient tard dans l’avenue Montaigne.
Rien n’était curieux, vivant, grouillant, amusant comme ce coin du parc, moitié naturel, moitié artificiel pendant une soirée du Grand Prix.
En temps ordinaire, c’était plus calme. D’ailleurs, tout Paris, et surtout la province et l’étranger allaient faire un tour à Mabille, et les jeunes mariés du dehors y venaient toujours passer une soirée pendant leur voyage de noces. J’en ai bien conduit ainsi, des plus comme il faut, des plus braves, comme l’on dit dans le midi, des jeunes ménages de mes amis ou de mes parents, et la stupéfaction de la jeune mariée était bien la chose la plus réjouissante du monde. D’ailleurs, relativement, il y avait à Mabille, infiniment plus de tenue qu’à la Closerie des Lilas; c’était plus chic. Je n’oserais pas dire plus collet monté en parlant d’un bal public où les étoiles avaient aussi pour habitude de se décolleter même par en bas.
Un soir de Grand Prix, comme j’ étais en train de faire cercle comme tout le monde autour de Valentin le-Désossé et une Goulue quelconque en fumant un cigare, je vis tout à coup à côté de moi Arsène Houssaye qui flânait là avec un ami, car il avait un faible pour Mabille qui lui fournissait parfois des types curieux pour ses romans. La valse finie, nous nous mîmes à causer et comme je lui demandais je ne sais plus quelle lettre d’introduction auprès de je ne sais quel directeur d’un grand journal, il me répondit vaguement et puis se ravisant Pourquoi diable aussi cette manie d’écrire, de vouloir être homme de lettres, journaliste, quand il est si simple d’être épicier ?
C’était au lendemain de la guerre, j’ étais encore jeune, très jeune même, mais enfin je fus piqué au jeu et le plus naturellement du monde: Mais, mon cher monsieur Houssaye, je pourrais vous poser la même question pourquoi n’ êtes-vous pas resté meunier comme votre père ? ‘0 Ça n’est plus la même chose. Évidemment, puisque mon père, à moi, est un écrivain connu.
Et nous nous séparâmes tout de même les meilleurs amis du monde, car à Paris tout un chacun a le caractère bien fait et légèrement sceptique dans nos milieux littéraires.
A cette époque Arsène Houssaye, avec sa belle barbe blonde fortement grisonnante, était encore superbe. Depuis il est mort, son fils est depuis longtemps de l’Académie et, nous avons tous plus ou moins fait notre chemin dans la grande mêlée littéraire.
C’est toujours un plaisir et une tristesse douce et mélancolique d’ énumérer ses souvenirs d’antan et vraiment dans ce diable de Paris il est toujours amusant de voir comment l’on commence un chapitre sur Valentin-le-Désossé et comment on le termine en parlant d’Arsène Houssaye, un des écrivains mondains les plus fins et qui a le mieux connu les femmes, de l’Empire et du commencement de la troisième République La génération présente ne le lit plus guère et elle a tort, car il nous a laissé des portraits, à fleur de peau si l’ on veut, mais tous fidèles, très ressemblants et très suggestifs des femmes du monde de l’Empire, d’ un monde très licencieux souvent et toujours avide de plaisir et de passions faciles.

Aujourd’hui, les bals publics ont disparu, Valentin-le-Désossé vient de s’éteindre dans la peau d’un vieux bourgeois, l’auto, la terrible auto a tout remplacé, tout fauché et parfois je me demande si l’on ne savait pas mieux s’amuser autrefois. 0 Mais je m’arrête; on dirait que je vieillis et comme Arsène Houssaye, je veux rester toujours jeune de cœur tout au moins.”
Paul théodore-Vibert -1907
Signalons enfin l’excellent Blog: MONTMARTRE SECRET
Copyright 2009 Philippe AUTRIVE – Tous droits réservés
Mes Mémoires – Jane AVRIL coll. PHEBUS
Ça c’est Cancan – Editions SOLAR par Fabienne TSAI – Octobre 2004.
http://www.montmartre-secret.com/2016/10/valentin-le-desosse.html
http://lesinsoumiseslexpositiondarlesenligne.blogspot.fr/2008/09/alice-la-provencale.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Valentin_le_D%C3%A9soss%C3%A9
Généalogie de Jules Etienne Edme Renaudin – Généalogie par Alain GARRIC – Geneanet –
Les mémoires de Céleste Mogador
Lafertealais.com©2005